Black Rocks
L’homme est assis. En face de lui, des pierres, des galets, petits, grands, rugueux, lisses, blancs, noirs, gris. Mais surtout noirs. Noires comme toutes les peines qu’il a eues. Noires comme toutes les difficultés qu’il a éprouvées. Noir comme ce qu’il broie actuellement. Sa pierre. Noir comme le mur qu’il construit, imbrication de toutes ces pierres cimentées par ce qu’il broie actuellement. Du noir. Et le mur avance, il se construit, comme un rempart au bonheur, comme une négation de la joie. Un grand mur noir. Il fait nuit, la lune éclaire. À peine. Il fait froid. Mais notre courageux bonhomme, tout de noir vêtu, continue sa besogne. Il continue son mur, sa maison, son rempart, son univers, son lui. L’aube arrive. À l’horizon, les premières lueurs apparaissent. L’homme décide alors d’ajourer son mur, de lui ajouter une fenêtre. L’espoir. Il se laisse enfin une chance de renaître. Et l’aurore de succéder à l’aube. Les premiers rayons de bonheur vont enfin arriver. Le soleil se lève. Contemplation de ce grand mur noir, de sa fenêtre, de son ouverture, de sa noirceur. Pourtant, voilà. Les premiers rayons de soleil transpercent déjà la carapace de notre bonhomme. Il arrête son affaire, et se concentre sur ses cailloux blancs. Et à bien y réfléchir, au fond, il y en a quand même pas mal. Pas autant que les noirs, certes, mais cela représente quand-même une belle quantité. Et c’est parti. Notre homme broie désormais… du blanc. Une grande quantité de blanc. Que prépare-t-il ? Du blanc. Plus tard, il lie ce blanc à l’eau. De cette mixture, qu’il rend consistante, il enduit le bout d’un rameau. Il peint. Il peint ce mur noir, ce monument au désespoir. Petit à petit, le mur blanchit. D’abord gris, mais le soleil aidant, la peinture sèche, et c’est déjà la deuxième couche. On ne voit bientôt plus de noir, effacé par la peinture. Notre homme sourit. La journée passe, et arrive bientôt le zénith. La température est montée, et la terre brule. Ce qui était tantôt un délice commence à se transformer en fournaise. Trop de bonheur, notre homme n’en peut plus. Il essaye maintenant de trouver de l’ombre. Impossible. Un mur c’est droit. Au zénith, il n’y a pas d’ombre. Notre homme s’effondre, se couche, s’endort. La journée passe. Le crépuscule arrive. Une légère brise arrive. L’homme se réveille. La nuit tombe. Son voile noir s’abat sur la terre. Il fait noir. L’homme est assis. En face de lui, des pierres…
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